19 – Double jeu ?

0
1044

Précédemment…

Le téléphone de Guillaume sonna, il était près de vingt heures. Il n’avait pas encore diné et n’avait pourtant pas faim. Le nom de Babette Bonnet apparu sur l’écran. Guillaume décrocha.

— Bonsoir Babette.

— Guillaume, je viens d’apprendre pour tes enfants, je suis désolé.

— C’est gentil d’appeler.

— Je voulais te proposer d’organiser une battue demain matin à la fraiche. J’ai vu avec les gars, on peut être une cinquantaine. On ratisse tous les bois des alentours, on va les retrouver tes pegs. Ils ont pas dû aller loin.

— On pensait faire ça avec Simon, en attendant que la gendarmerie s’en mêle. C’est sympa de nous aider.

La discussion continua pour définir les emplacements dans lesquels les différents groupes chercheraient. Guillaume et Babette décidèrent de se retrouver à la ferme vers six heures du matin le lendemain matin. Alors qu’ils terminaient la conversation, Guillaume reçut un double appel d’un numéro inconnu. Il coupa la conversation avec Babette et prit l’autre appel.

— Allo, dit une voix féminine d’un certain âge ? Monsieur Pétrie ?

— Oui, c’est bien moi. Qu’est-ce que je peux faire pour vous ?

— Je suis madame Loridon. J’habite Rives. J’ai voté pour vous aux élections. J’en avais un peu marre de madame Bonnet. Mais ce n’est pas pour ça que je vous appelle. J’ai entendu que vos enfants avaient disparu et je me suis souvenu que je les ai vus cette après-midi. Vous voyez ma petite fille, Emma, est dans la même classe que votre fils. Je vais la chercher à l’école tous les jours parce que mon fils travaille. Je vois toujours votre fils et votre fille, de gentils enfants, bien élevés. Je les vois prendre le bus, accompagnés de Virginie, la maitresse d’Emma. Mais aujourd’hui, Virginie les a confiés à un homme, qui n’était pas vous, c’est sûr…

Le cœur de Guillaume s’arrêta de battre. Il lui coupa la parole.

— Elle ne les a pas mis au bus, demanda-t-il incrédule ?

— C’est ce que je vous dis. Il y avait un homme, un grand baraqué avec une barbe, qui attendait. Je n’ai pas fait attention plus que ça parce que tout semblait normal. Sauf que quand j’ai entendu, par ma voisine, que vos enfants n’étaient pas rentrés, je me suis souvenu de ça.

— Merci madame… Guillaume marqua une pause pour se souvenir du nom de son interlocutrice.

— Loridon, j’habite à côté de la mairie.

— Merci madame Loridon. J’aurais sans doute besoin de vous pour aller à la gendarmerie. Je vous rappelle.

Guillaume raccrocha sans demander son reste, appela Anne pour lui rapporter la conversation, puis composa le numéro de la gendarmerie pour apporter ce complément d’information. Le gendarme nota tous les éléments et dit à Guillaume qu’il avait des éléments nécessaires pour informer le procureur en urgence qui déciderait de déclencher le dispositif Alerte Enlèvement. Guillaume informa aussi qu’un groupe de connaissances avait prévu de se retrouver chez lui demain matin à six heures pour organiser des battues. Le gendarme nota de nouveau l’information et lui dit qu’il reviendrait vers lui rapidement pour lui faire savoir le dispositif mis en place de recherche. Enfin, il demanda le téléphone de la personne qui l’avait appelé pour signaler la présence de l’homme qui avait semble-t-il enlevé les enfants.

Le doute n’était plus possible. Les enfants étaient en danger. Qui pouvait être cet homme ? Que leur voulait-il ? Que voulait-il aux enfants ? Où étaient-ils ? Est-ce qu’ils avaient mangé ? Des dizaines de questions envahissaient la tête d’Anne qui tournait en rond autour de la table basse du salon comme une lionne en cage. Son téléphone portable émit la petite musique de réception d’un SMS. Elle l’attrapa et lut le message : « Tu dit a ton mari de retiré la zone de cunus et on te rent tes enfants ».

— Guillaume, viens voir ce que je viens de recevoir.

— Il y a un numéro de téléphone, demanda-t-il ?

— Il est masqué.

— Je rappelle la gendarmerie.

En discussion avec le gendarme, ce dernier lui dit de lui faire parvenir le texte du message, le numéro auquel il avait été envoyé et l’heure exacte. Il allait communiquer les éléments pour faire une recherche d’envoi du texto. Cependant, il ne fallait pas avoir beaucoup d’espoir. Il existait des dizaines de services sur internet qui permettait d’envoyer des textos anonymes. Il était virtuellement impossible de savoir par qui ils avaient été envoyés, mais il passerait quand même les informations.

En attendant, le témoignage de madame Loridon et ce message étaient les preuves que les enfants avaient été enlevés et étaient en danger. Quelques minutes plus tard, le procureur déclenchait l’alerte enlèvement et le message était diffusé sur toutes les radios et télévisions. La chasse à l’homme était lancée.

Guillaume appela Babette. La seule qui s’était opposée au projet de zone naturiste était elle. Et si c’était elle qui avait manigancé toute cette affaire. Il devait en avoir le cœur net. Babette décrocha.

— Guillaume, j’ai entendu le message sur Europe 1, les gendarmes ont avancé ?

— Babette, dis-moi que ce n’est pas toi ou ta clique qui a organisé tout ça.

— Quoi, dit Babette en s’étranglant ? Tu crois que j’ai enlevé tes enfants ?! Pourquoi j’aurais fait ça ?

— Parce qu’on a reçu un SMS me demandant de retirer le projet de zone naturiste pour qu’on me rende mes enfants.

— Mais c’est insensé. Je ne suis pas d’accord, mais de là à toucher à tes enfants, il y a un pas que je franchirai pas. Tu me connais, je ne suis pas comme ça.

— On ne connait jamais bien les gens, tu sais. La nature humaine n’est pas toujours belle. Les deux gugusses qui sont venus chasser à proximité de la maison ne semblaient pas avoir des intentions sympathiques. Je pense que tu sais de qui je veux parler, José et Patrick.

— Guillaume… s’esclaffa Babette, José et Patrick ne sont pas certainement pas les deux gars les plus subtils, mais ce sont des gars biens. Ce n’est pas moi qui les ai envoyés chez toi.

— Je ne sais pas, je trouve que les coïncidences sont trop nombreuses. On verra bien. J’espère sincèrement que tu n’as rien à voir là-dedans.

— Je te le jure, Guillaume.

— On verra bien, répéta-t-il avant de raccrocher.

Et si, après tout, il s’agissait de Babette. Si elle avait tout manigancé pour lui faire peur. Elle savait utiliser de l’intimidation quand elle le voulait. Il l’avait vue à l’œuvre plusieurs fois à la mairie. Elle ne reculait devant aucun coup bas. Elle avait été à bonne école avec son père et son grand-père. Il chassa l’idée de son esprit et prit Anne dans ses bras. Ses parents les avaient rejoints, ainsi que Simon et Marie, avec des aliments à grignoter. Guillaume ouvrit une bouteille de syrah et servit tout le monde. Ils mangèrent en silence, dans une atmosphère pesante.

Une seule question obsédait Guillaume. Où pouvaient être les enfants ? Il cherchait et ne trouvait aucune réponse. Il faudrait remonter le fil de cet homme entrevu à l’école. Virginie, la maitresse, était devenue suspecte aussi. Comment avait-elle pu laisser les enfants à un inconnu ? Les règles étaient pourtant claires. 

Le mystère s’épaissit quand Anne appela Virginie qui était effondrée. Elle lui dit qu’Anne l’avait appelé dans la matinée pour lui dire que ce serait un ami, Jean-Luc, qui viendrait chercher les enfants. Mais Anne n’avait pas appelé, lui dit-elle. Mais si, tiens, j’ai encore la trace de ton appel, depuis ton numéro de téléphone, ce matin, pile à l’heure de la récréation. Et puis c’était sa voix, elle l’avait reconnue. Anne ne comprenait pas. Elle n’avait pas appelé Virginie. Si le téléphone de cette dernière avait conservé une trace de son appel, celui d’Anne n’en avait aucune. Elle raccrocha et donna les éléments de cette autre énigme. Guillaume rappela la gendarmerie pour donner les numéros de téléphone de la maitresse et de son épouse. Le gendarme lui dit qu’il allait transmettre ces éléments. En tout cas, confia-t-il, la préméditation est bien avérée.

Tout ceci n’avait aucun sens pour Guillaume. Un SMS de provenance inconnue, un coup de téléphone qui n’avait jamais été donné et qui avait pourtant été reçu, quelle serait la prochaine étape ? Des extra-terrestres, des soucoupes volantes… On nageait en plein délire et seule l’absence des enfants se faisait cruellement et réellement ressentir. Guillaume n’arrivait pas non plus à absoudre complètement Babette. C’était elle qui l’avait menacé en épinglant le mot sur sa porte. C’était elle qui avait organisé la manifestation devant la mairie. C’était elle, même s’il ne pouvait pas le prouver qui avait manigancé cette histoire de photo et de plainte. C’était ses copains de chasse qui étaient venus faire de l’intimidation à proximité de chez lui. Pourquoi ne serait-ce pas elle qui avait enlevé ses enfants, les séquestrait Dieu sait où pour le faire chanter et renoncer à ses projets qui lui tenait à cœur et au final pour qu’il devienne une marionnette entre les mains des Bonnet. Non décidément, il n’avait aucune preuve, mais tout convergeait vers les Bonnet et leur clique.

Le stress et la fatiguent eurent raison de Anne et Guillaume qui, à minuit passé, décidèrent d’aller se coucher. Le réveil les fit sortir du lit à cinq heures trente et à six heures ils étaient prêts à battre la campagne pour trouver Agnès et Matthieu. Guillaume sortit de la maison et trouva une centaine de personnes qui attendaient, dont une trentaine de gendarmes, des maitres-chiens et leurs bêtes.

À suivre…

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.