Le naturisme, c’est d’un vulgaire !

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Voilà la petite phrase entendue au cours d’un diner alors que le sujet du naturisme était arrivé presque naturellement. Je pose alors la question presque naïve : « qu’est-ce que tu entends par là ? ». La réponse fuse : « se foutre à poil devant les autres, c’est un manque évident d’éducation, c’est tout. » Je garde un air calme : « donc si je te dis que je suis naturiste, cela va impliquer que je manque d’éducation. » Le regard de mon interlocuteur se pare d’un voile d’inquiétude : « tu es naturiste ? ». « Eh oui ». « Et ça ne te dérange pas que tout le monde te voie à poil? ».

Je vous fais grâce du reste de la discussion qui a oscillé entre déni des bienfaits de la simple nudité et relent d’obligations morales. Pas certain que cette personne me porte dans son coeur dorénavant, mais peu me chaut, mon opinion de naturiste ne s’en trouve pas ébranler. Cependant, la phrase, le naturisme, c’est d’un vulgaire, m’interpelle. Quand j’entends l’adjectif vulgaire, je pense à des attitudes irrespectueuses, l’utilisation de « gros mots », et aussi à Zézette, épouse X, du Père Noël est une ordure. Comme à chaque fois qu’un phrase ou un mot m’interpelle, je file ouvrir le dictionnaire et entreprends de faire un point éclairé. Le naturisme est-il donc vulgaire ?

Dis maman, ça veut dire quoi vulgaire ?

Pourquoi ai-je illustré cet article sur le naturisme par une marguerite ? Devrais-je dire une « vulgaire » marguerite pour signifier que cette fleur est commune et n’a pas la finesse, la grâce ou la beauté d’un lys ou d’une rose ? Il s’agit bien d’un des usages du mot vulgaire. Pourtant que c’est beau une marguerite dans un champ, dans un jardin ou juste dans un vase. C’est avec une marguerite qu’on joue à « Je t’aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout ». Un marguerite est une belle fleur, sans doute moins « raffinée » qu’un lys ou une rose, cela ne lui enlève rien de sa beauté propre. En ce sens, je ne la trouve pas vulgaire.

Le Larousse, nous donne plusieurs définitions du mot vulgaire, dont trois m’intéressent plus, à priori.

1. Qui est sans aucune élévation, qui est ordinaire, prosaïque, bas, commun. Si le naturisme est vulgaire, est-il ordinaire, prosaïque, bas, commun, sans élévation ? Je pense effectivement que la naturisme se devrait d’être ordinaire et prosaïque. Mais n’y a t-il pas un peu d’extraordinaire, d’épique, de noble, de merveilleux à être nu, seul ou avec d’autres ? La nudité est-elle basse, commune et sans élévation ? Voilà deux questions auxquelles je tente de répondre dans la deuxième partie de ce billet, nudité et vulgarité, et qui trouveront une résonance particulière dans le fait que le naturisme n’a rien de vulgaire en soi.

2. Qui manque d’éducation, de délicatesse, qui fait preuve de grossièreté. Si le naturisme est vulgaire, manque-t-il d’éducation, de délicatesse, fait-il preuve de grossièreté ? Il apparait ici de façon évidente que cette définition ne s’applique pas à une pratique, celle par exemple d’être nu(e) pour vaquer à ces occupations quotidiennes ou de vacances, mais à un individu. On peut effectivement dire qu’un individu qui manque d’éducation, de délicatesse ou fait preuve de grossièreté, qu’il est vulgaire. Je le qualifierai aussi d’irrespectueux, pour soi et pour les autres. Donc, non, le naturisme n’est pas ce vulgaire-là.

3. Qui est quelconque, ne dépasse pas le niveau moyen. Si le naturisme est vulgaire, est-il quelconque, ne dépasse-t-il pas le niveau moyen ? Ah, voilà le retour de la moyenne. C’est quoi le niveau moyen ? Mathématiquement, la moyenne est définie avec précision, c’est « quotient de la somme de plusieurs valeurs par leur nombre » (définition Reverso Dictionnaire). Mais pour les individus ou les pratiques, un niveau moyen, c’est quoi ? L’inverse d’un niveau olympique ? Il faut une échelle de valeurs pour qualifier la moyenne. Le naturisme ne dépasse pas quel niveau moyen ? La moyenne d’une population ? Cela sous-entend-il que le naturisme, c’est un truc de classe moyenne ? Pourtant on rencontre de tout dans un espace naturiste, comme partout, d’ailleurs. La terrasse d’un café, c’est vulgaire ? Bon, je n’arrive pas me décider sur ce niveau moyen, ce n’est donc pas cette vulgarité-là qui nous intéresse.

Nous avons les bases du sens du mot vulgaire, regardons-le maintenant de façon détaillé à l’aune de la caractéristique principale du naturisme : la nudité. Stop ! Dans naturisme, il y a nature, environnement, respect, et tout, et tout, et tout. On les laisse de côté ? Non, pas du tout, mais force est de constater que lorsqu’on parle de naturisme, on pense nudité. C’est d’ailleurs clair dans la réponse donnée à ma première question, dans laquelle il est tout de suite du fait d’être « à poil ». Si on n’élimine pas l’éléphant dans la pièce, rien ne sert d’essayer de voir le pot de fleurs qu’il cache. Mais j’y reviendrai !

Nudité et vulgarité

Le nu, c’est d’un vulgaire, n’est-ce pas ? Bon, nous avons tous un corps, le même dans les grandes lignes. Rien n’a dire de ce côté là. Si le nu est vulgaire, Picasso, Courbet, Gauguin, entre autres sont des peintres vulgaires. Ah non ? Ce n’est pas la même chose. Un nu en peinture ou en sculpture, c’est de l’art. Un nu en vrai, c’est du lard.

Faisons un petit exercice de pensée. Pensez à une personne que vous estimez. Choisissez une personne dont vous estimez les idées, les points de vue, les réalisations. L’idéal est de connaitre cette personne et qu’elle vous connaisse aussi. Ainsi, si vous la croisiez dans la rue, vous serez ravi(e) de discuter quelques minutes avec elle. Vous l’avez ? Sinon, prenez quelques minutes supplémentaires. Imaginez maintenant que vous vous promenez sur une plage l’été. Vous êtes détendu, le soleil est chaud, sans plus, une lègére brise caresse votre visage. Soudain, vous vous rendez compte que les personnes sur cette plage sont nues. Vous avez, sans vous en rendre compte, atteint une partie naturiste de cette plage. Au moment où vous décidez, un peu agacé, de faire demi-tour, une personne se lève, vous fait de grands signes et se dirige vers vous. En une fraction de seconde, vous réalisez que c’est cette personne que vous estimez beaucoup qui vient vers vous, entièrement nu. Impossible est votre première réaction. Untel ou unetel ne serait jamais sur une plage naturiste ! C’est un exercice de pensée. Imaginez que si, il s’agit bien de cette personne que vous tenez en haute estime qui se tient devant vous, nu(e). Allez-vous changer d’opinion sur cette personne ? Allez-vous la considérer de vulgaire, alors que par ailleurs vous l’estimez ? Ou, allez-vous essayer de comprendre ce qui la motive à être nu(e) sur cette plage au milieu d’autres vacanciers, nus eux aussi ?

Tant que vous ne saviez pas qu’elle était naturiste, vous estimiez cette personne. Du moment où vous découvrez qu’elle est naturiste, allez-vous cesser d’apprécier ses points de vue, ses idées ou ses réalisations ? Vous voyez, de nombreux hommes et femmes célèbres ont été ou sont naturistes: Heidi Klum, Dame Helen Mirren, Gilles Verdez, Christine Boutin, Robbie Williams, Salvador Dali, pour n’en citer que quelques-uns. Il y a, à mon humble avis, une énorme différence à faire entre pratique et pratiquant. Comme dans toute société, il y a des personnes irrespectueuses et vulgaires, d’autres qui sont empathiques et respectueuses. Il en va aussi des naturistes.

La nudité n’est ni basse, ni commune et sans élévation

En quoi la nudité serait-elle basse, commune et sans élévation ? Quiconque s’est déjà baigné(e) nu dans la mer, un lac ou une rivière, s’est déjà promené(e) nu dans la nature ou a simplement vaqué à ses occupations quotidiennes en tenue de peau, sait combien le sentiment de liberté est pregnant. Evidemment, si la nudité est un tabou, ce sentiment de liberté sera réprimée par la honte, une impression de saleté et de bassesse quasi animale. C’est d’ailleurs un des arguments des anti-naturisme : nous ne sommes pas des animaux, nous avons des habits pour nous couvrir.

On établit alors une échelle de valeur. Ces pauvres animaux ne sont pas bien évolués. Nous, humains, sommes évolués et nous nous vêtons pour montrer notre extraordinaire évolution. Pourtant, notre évolution artificielle a démontrer comment nous détruisons notre environnement à une vitesse incroyable: pollutions, destructions des espèces animales et végétales, maladie, guerre, etc… Est-ce cela qui fait de nous les êtres plus évolués du règne animal? Pas certain… Les animaux ont sans doute plus de sagesse dans ce qui peut parfois passer pour de la cruauté.

La nudité est un état naturel, sans artifice, sans arrière-pensée. Nu, nous sommes vulnérables et cette vulnérabilité ouvre la porte à l’extraordinaire et au merveilleux.

L’extraordinaire, le merveilleux, l’épique et le noble de la nudité

Être nu(e) est extraordinaire et merveilleux. Le moment où le lien est totalement cassé entre nudité et sexualité, la nudité devient ordinaire, redevient normal et pourtant garde une dimension extraordinaire et merveilleuse. La nudité nous remet face aux éléments, fragile et conscient de cette fragilité. Elle commence par nous fragiliser physiquement et psychologiquement. En abattant les barrières qu’ont érigées la société, la culture et la religion, on se retrouve psychologiquement nu. C’est un choc que certaines personnes ne peuvent pas supporter.

Une fois ces barrières abattues, on développe une force mentale hors du commun. On retrouve un équilibre perdu. On s’aperçoit que certains problèmes de peau disparaissent, que la confiance en soi se développe et qu’on retrouve une liberté perdue. La nudité rentre alors dans le domaine de l’épique et du noble. Le regain d’une liberté oubliée et interdite. Malheureusement, ne nous y trompons pas, la société, la culture et la religion continueront de nous enlever cette liberté, car rien ne les perturbent plus que des personnes en liberté qui ne répondent pas aux injonctions consuméristes et moralisantes. La crise sanitaire et la réponse des gouvernements à la crise climatique sont des exemples criants du « faites ce que je dit, pas ce que je fais ».

Alors non, la nudité n’est pas vulgaire. Elle en est tout le contraire. Elle est le symbole de personnes fortes, bien dans leur peau et fières d’être qui elles sont, nues. La nudité simple et naturelle n’étant aucunement vulgaire, le naturisme ne l’est pas non plus.

Non, le naturisme n’a rien de vulgaire

L’irrespect, la société et l’église ont rendu la nudité vulgaire. Elle ne l’est pas en soi. Ce sont les attitudes qui sont vulgaires, pas l’état de nudité. Une personne irrespectueuse le sera dans un espace naturiste comme elle pourra l’être dans un espace textile. Faire du corps nu un tabou le pare de mystères, le revêt d’une couche de fantasme, l’érotise et le rend vulgaire aux yeux du vulgum pecus. Toute personne qui s’est déjà rendue dans un espace naturiste (hors Cap d’Agde et resort pour adultes, lifestyle comme disent les Américains) s’est très rapidement rendue compte que la nudité disparaissait. On ne la remarque plus. Non que l’on ne voit plus que les personnes sont nues autour de nous, mais que la nudité n’est plus « remarquable », elle devient juste « normale », un état d’être. De ce fait et presque rien que pour cela, le naturisme n’a rien de vulgaire.

Les naturistes sont-ils vulgaires dans un espace naturiste ? Non, bien évidemment. Qu’il y ait des naturistes vulgaires, au sens des définitions données plus haut, ne fait pas de doute, encore que vulgaire pour certain puisse être insignifiant pour d’autre. Pour ma part, vulgarité est avant tout synonyme d’irrespect. Un couple qui fera l’amour au vu et su de tous dans un espace naturiste sera vulgaire, même si l’acte sexuel n’est pas vulgaire en soi. Une bande de personnes qui fera du bruit ou mettra de la musique à fond alors que l’environnement appel au calme sera vulgaire, même si faire du bruit ou écouter de la musique à fond n’est pas vulgaire en soi. Le vulgaire se définit par une attitude, non par un être. Il en va des naturistes comme de toute personne, certains sont vulgaires, d’autres pas.

Le naturisme, c’est retrouver une certaine forme d’innocence, celle de la nudité simple. Ce n’est pas l’exhibitionnisme que justifie les antis. Être nu, ce n’est pas s’exhiber, c’est être, simplement. L’exhibition est la volonté d’attirer le regard pour satisfaire des pulsions sexuelles. Le naturisme n’est pas sexuel, il ne peut donc être exhibitionniste. On va souvent rétorquer que montrer ses parties intimes, ça ne se fait pas, c’est vulgaire, c’est de l’exhibition. Cette fixation sur les parties intimes est perturbante. Pourquoi seraient-elle à cacher, plus qu’une main, une cheville ou des cheveux ? De tout temps, les questions religieuses ou culturelle ont fait se couvrir plus ou moins certaines parties du corps ou édicter des façons de s’habiller. Le voile en est un exemple. Il s’agit d’une règle imposée par un homme (un prophète) à ses congénères pour obéir aux règles qui lui ont été dictées par Dieu. Il s’agit surtout d’un moyen pour dicter le comportement d’autrui et mieux le contrôler. Ce n’est pas une règle rationnelle ou humaine. Elle est irrationnelle (religieuse) et inhumaine (imposée par Dieu).

Le naturisme, quant à lui, est rationnel et humain. Rationnel en ceci que nous sommes des êtres dont la nudité est nécessaire à une vie saine, notre peau ayant besoin de respirer et d’être exposée aux éléments pour être en bonne santé. Humain car respectueux de soi, des autres et de l’environnement. Le naturisme est sans aucun doute une réponse à la crise climatique, en supprimant notre dépendance mercantile aux vêtements, en revenant aux plaisirs simples de la vie, en respectant la nature et en replaçant l’être humain au sein de la nature dont nous avons tant besoin pour vivre une vie bonne et belle.

Alors, non, le naturisme n’a rien de vulgaire, il est en fait tout le contraire. Le naturisme est art de vitre en communion avec soi-même, les autres et la nature. Le naturisme est un moyen disponible à tous, de vivre une vie simple, harmonieuse et naturelle. Le naturisme est tout simplement extraordinaire et merveilleux, l’antithèse du vulgaire !

Si on vous dit que le naturisme est vulgaire, répondez que non. Le naturisme n’est pas vulgaire, il est le reflet d’une humanité belle et simple, que l’on peut qualifier avec le mot valise inventé par l’APNEL (Association pour la Promotion du Naturisme En Liberté): notre humaNUté. Vivre nu est et devrait être considéré comme un droit humain fondamental et inaliénable, le naturisme disparaitrait alors, remplacé par la normalité d’une vie nue, en harmonie avec la nature et notre environnement. Le naturisme est extraordinaire et merveilleux, en toute simplicité. Belle et bonne journée, nu(e) comme il se doit !

Dénudez-vous, restez nu, vivez nu et partagez l’amour du naturisme !

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